Critique de film

12/12/2014 20:44

Franc succès pour La French

Par Giulia C.  

Le film-événement de Cédric Jimenez vient tout juste de sortir que déjà critiques et spectateurs en tout genre se pressent pour admirer un Jean Dujardin bien loin du Loulou d’Un Gars Une Fille. Jean Dujardin en scène, d’accord, mais La French, c’est d’abord une distribution efficace (Gilles Lellouche, Mélanie Doutey, Benoit Magimel) doublée d’une reconstitution très correcte du Marseille de la fin des années 70.

    La French, c’est l’histoire vraie d’un jeune juge chargé d’éradiquer le grand banditisme à Marseille.  Corps et âme, le juge Michel se bat pour coffrer les grands pontes du trafic d’héroïne à l’œuvre dans la cité phocéenne, et parmi eux « la tête de la pieuvre », Gilles Lellouche dans la peau de Gaëtan « Tany » Zampa, le grand parrain marseillais de l’époque Gaston Deferre. Mélanie Doutey incarne la femme de Zampa, potiche de luxe et femme de voyou, tandis que Benoit Magimel est « le Fou », truand d’abord humilié et très vite aveuglé par une folie vengeresse.  

    Le film est porté avec brio par le duo Jean Dujardin-Gilles Lellouche. Amis à la vie, ennemis sur grand écran, le face à face entre la justice incarnée et le grand patron du « Milieu » fait mouche et séduit. Si les seconds rôles ont le mérite d’exister, on peut regretter l’absence de personnages féminins consistants, véritables faire-valoir des hommes de la French, à l’exception près de la dernière scène du film, où Jacqueline Michel, alias Céline Sallette, fait preuve d’une émotion à fleur de peau. On reconnait les efforts du réalisateur pour envelopper le film dans la moiteur du Sud ; des Gitanes qui se consument sur le cendrier, le papier-peint à fleurs, le crissement des cigales et bien sûr, le bouillonnement d’héro… On s’y croit, la DS noire de Jean Dujardin nous transporte dans un Marseille qui se tait.

    Petit bémol à cette réalisation impeccable : les inexactitudes biographiques sur la vie privée du juge Michel. Selon la famille du magistrat, qui s’est exprimée dans un communiqué après la sortie en salle, de nombreux détails relèvent - trop ? - de la fiction. Parmi eux, l’addiction au jeu de Pierre Michel ou encore la brève séparation avec sa femme. On note cependant que le scénario se veut seulement inspiré de faits réels ; La French n’est pas un biopic, comme l’a souligné Jean Dujardin. On s’étonne enfin du goût amer que les dernières minutes du film, consacrant la victoire du crime sur la justice et la corruption, laissent aux spectateurs.

    Captivant, révoltant et cynique à souhait, c’est finalement un quasi sans faute pour la French. S’il n’est pas le film de l’année, il a toutefois le mérite de relever le niveau de la production française souvent à la traine pour s’approprier les subtilités du genre, et à faire de notre Loulou national l’acteur français le plus bankable du moment.

Par Giulia C.